PAS D'ARGENT POUR PÉRENNISER LA RADIO

Pas d'argent pour pérenniser la radio

La radio des enfants lance un appel à l’aide et crée l’Association de Défense de SUPERLOUSTIC (ADS)

Malgré un succès évident, les annonceurs restent réticents à investir dans un nouveau média radio destiné aux enfants. Le marché est encore inconnu et perçu comme risqué, d’autant que Médiamétrie ne fournit aucun indice d’audience pour cette tranche d’âge. Ils privilégient la télévision, considérée comme un vecteur d’image plus puissant. Alors que personne ne croyait que les enfants écoutaient la radio, un sondage Médiamétrie commandé par la régie publicitaire GEM en février 1992 révèle que SUPERLOUSTIC compte 200 000 auditeurs fidèles. Les moins de quinze ans écoutent même davantage la radio que leurs aînés ! Parmi les 9-10 ans de sa zone d’écoute, la station est leader du marché le week-end et deuxième en semaine. Mais ces résultats arrivent trop tard.

Le Nouvel Observateur - 5 mars 1992
Le Nouvel Observateur – 5 mars 1992

Dans un contexte économique et politique difficile, marqué notamment par le scandale du Crédit Lyonnais, actionnaire de la radio via Innolion (16,52 %), la société IDL SA accumule rapidement les dettes. Son budget annuel, estimé à 15 millions de francs, est trop élevé. Les recettes publicitaires, fixées entre 10 et 11 millions de francs, ne sont pas atteintes, et les revenus annexes générés par la télématique, le 36.15 code Loustic, l’audiotel, les produits dérivés et la coédition musicale ne suffisent pas à combler le déficit. SUPERLOUSTIC perd de l’argent.

Télérama - 20 mai 1992
Télérama – 20 mai 1992

Début mars 1992, IDL SA tente de trouver de nouveaux investisseurs après le départ de son principal actionnaire, Franck Goddio, parti en expédition au large des Philippines. Mais, refroidis par une situation financière précaire, les investisseurs restants se désengagent à leur tour. Face à des dépenses colossales, un développement trop rapide et un manque d’enthousiasme des annonceurs, IDL SA, gestionnaire de SUPERLOUSTIC, ne peut plus honorer ses dettes. La société est déclarée en cessation de paiement le 22 avril 1992, puis placée en redressement judiciaire le 12 mai par le tribunal de commerce de Paris. Elle a jusqu’au 9 juin 1992 pour présenter un plan de continuation.

SUPERLOUSTIC est mise en vente. Plusieurs acteurs du paysage radiophonique, dont M40, NRJ, Fun Radio et RFM, se portent candidats au rachat des 32 fréquences. Les quarante salariés et pigistes de la station se mobilisent pour défendre le maintien d’une programmation destinée aux moins de 15 ans sous le nom de SUPERLOUSTIC. M40 annonce que, s’il remporte l’appel d’offres, il restituera la fréquence parisienne, ainsi que celles des villes où il est déjà implanté, afin de conserver uniquement les fréquences nécessaires à la construction d’un grand réseau de près de 100 émetteurs. Le CSA prend position et s’oppose fermement à une absorption abusive des fréquences de SUPERLOUSTIC. Le 9 juin 1992, le tribunal de commerce de Paris rejette les offres des repreneurs, empêchant ainsi tout démantèlement du réseau.

ASSOCIATION DE DEFENSE DE SUPERLOUSTIC (A.D.S.)
A.D.S. – Annonce J.O. parue le 8 juillet 1992

Le 11 juin 1992, une tentative de sauvetage est lancée par Denis Didelon, Joël Pons et Gilles Gressier, avec la création de l’Association de Défense de SUPERLOUSTIC (A.D.S.). Les dons collectés permettent à la radio de poursuivre ses émissions et d’entamer des démarches auprès des institutions pour préserver en France une chaîne de radios destinée aux enfants. Dans sa déclaration au Journal officiel des associations de juillet 1992, l’ADS annonce avoir pour mission « la défense des intérêts du réseau FM SUPERLOUSTIC, la pérennité de son concept, la protection des droits de l’enfant et, plus généralement, de tous les programmes, supports ou formes de communication s’adressant aux enfants ».

Le Nouvel Observateur - 25 juin 1992
Le Nouvel Observateur – 25 juin 1992

Faute de repreneur, la société IDL SA est placée en liquidation judiciaire le 16 juin 1992. Le satellite diffusant les programmes en province est immédiatement coupé par le créancier. Dès le lendemain, à 11 heures, une conférence de presse est organisée avec toute l’équipe de la station pour lancer un appel au secours. Les médias répondent présents : journaux télévisés, radios et presse écrite relaient aussitôt la nouvelle de la disparition imminente de la seule radio pour enfants en France et de la mobilisation de ses jeunes auditeurs.

0%